10/10/2018 - SLG et ADER

SÈVRES
15.000 - 20.000 € / Etude Ader et SLG enchères, 10 octobre 2018, Hôtel Drouot

Lot 126

SÈVRES

Écuelle couverte en porcelaine dure nommée écuelle de la toilette à fond brun à décor en or de figures d’enfants marins et tritons dans le style étrusque parmi des rinceaux feuillagés, branches fleuries et coquillages.
Marquée LL entrelacés, lettre-date GG pour 1784 et marque de peintre non identifiée : trois points.
XVIIIe siècle, année 1784.
L : 20 cm

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Provenance :
Galerie Dragesco-Cramoisan, rue de Beaune, Paris

En 1782, à l’occasion de la visite en France de Maria Feodorovna, Grande Duchesse de Russie et de son mari, Paul Petrovitch, le futur Tsar Paul Ier, voyageant sous les noms de comte et comtesse du Nord, Louis XVI et Marie-Antoinette leur offrent en guise de cadeau diplomatique plusieurs porcelaines de la manufacture de Sèvres dont une Toilette, aujourd’hui encore conservée au Palais de Pavlosk, composée de plus de soixante pièces de formes inédites parmi lesquelles figure une nouvelle écuelle nommée alors écuelle de la toilette. Ces formes nouvelles ne sont majoritairement pas réutilisées à l’exception du gobelet de la toilette et de l’écuelle de la toilette, dans une deuxième grandeur.

Un dessin de l’écuelle de la toilette conservé aux archives de la manufacture de Sèvres porte l’inscription Écuelle de la nouvelle toilette de la Princesse du nord faitte en lanée 1782 et Cette 2e grandeur a été faitte le 23 juillet 1783 et commendé par Monsieur Régnier et Trait d’Écuelle de la nouvelle toilette de la princesse du Nord faitte en lanée 1782 et reprie dapres le model en platre le 23 juillet 1783.

Le décor de figures étrusques ou frizes étrusques apparaît également pour la première fois à Sèvres sur la Toilette de la comtesse du Nord. Certaines de ces frises étrusques peintes en or ont pour source des gravures publiées par Henri Salembier en 1777 dans le Cahier de Frises Composées et Gravées par Salembier.

Selon les registres d’enfournement et de paiements des peintres conservés aux archives de la manufacture de Sèvres, trois écuelles de la Toilette sont produites en 1784.
Le peintre Sinsson reçoit paiement en novembre 1784 pour une écuelle et plateau de la toilette fond pourpre arabesque très riche. Cette écuelle semble inconnue à ce jour.

Le peintre Nicolas-Pierre Pithou jeune est également payé en octobre 1784 pour une écuelle et plateau de la toilette, beau bleu frize étrusque très riche. Cette écuelle par Pithou jeune est aujourd’hui conservée au Art Institute de Chicago et a fait l’objet d’une étude par Ghenete Zelleke, « Sèvres Porcelain of the 1780’s decorated in the Neoclassical style with figures Etrusques en or in the Art Institute of Chicago’s collection », The French Porcelain Society Journal, vol. III, 2007, pp. 141-149.

Le registre de paiements des peintres mentionne également ce même jour que Pithou jeune a composé et dessiné une seconde écuelle de la toilette frize étrusque. (Archives, Cité de la céramique, Sèvres et Limoges, Vj3 f° 217 et 235).
Il est possible que l’exécution de cette seconde écuelle de la Toilette dessinée et composée par Pithou ait été confiée à un autre peintre-doreur. Notre écuelle à fond brun imitant le laque à frises étrusques doit en effet être rapprochée de la mention dans le registre des travaux extraordinaires pour l’année 1784 sous le nom de Lécot d’une écuelle frize étrusque, à nouveau mentionnée dans le registre d’enfournement le 27 décembre 1784 avec précision du fond de couleur : 1 écuelle fond laque 2me gr [grandeur] frize Etrusque Lécot. (Archives, Cité de la céramique, Sèvres et Limoges, F26 et Vl2 f° 124v).

Les registres de ventes de la manufacture de Sèvres ne précisent ni la forme ni le décor des écuelles vendues entre 1784 et 1786. La richesse du décor de notre écuelle laisse supposer un prix élevé. Plusieurs écuelles sont vendues plus de 280 livres à Versailles en décembre 1784 : à Madame Adélaïde à 288 livres, à la comtesse de Provence à 360 livres, au comte de Vergennes, ministre des affaires étrangères pour présent à la Princesse des Asturies à 360 livres. Quatre écuelles sont vendues comptant à des acheteurs anonymes l’une au prix de 288 livres, une deuxième à 360 livres et deux à 600 livres.

Le décor de figures ou frises étrusques sur fond brun à l’imitation du laque est à rapprocher de la bouillotte par Charles-Eloi Asselin également conservée au Art Institute de Chicago et détaillée avec l’écuelle de la toilette par Ghenete Zelleke, op. cit., pp. 146-149.